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Préparer la transmission de son patrimoine

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La question de la transmission du patrimoine s’inscrit dans le prolongement de la transmission de l’exploitation. Anticiper ce sujet délicat permet de préserver l’entente familiale.

La question de la transmission du patrimoine s’inscrit dans le prolongement de la transmission de l’exploitation. Il s’agit d’un sujet délicat, parfois source de malentendus. Au-delà de leur seule volonté, les futurs cédants ont tout intérêt de requérir celles de leurs enfants : la rencontre en famille s’impose, tant que faire se peut. Anticiper permet de réunir toutes les conditions qui permettront, au-delà de la réduction des droits de succession, de préserver l’entente familiale.

Accepter l’expression des émotions

La transmission du patrimoine rattaché ou non à l’activité agricole n’est jamais purement matérielle. Que vous soyez conscient ou non de la dimension émotionnelle qu’elle comporte, la succession peut rouvrir d’anciennes blessures voire des traumatismes de successions passées. Cela confère une vision négative de la succession comme source de potentielles querelles. « Orientez l’échange vers l’avenir et faites-vous rassurant. Les aspects émotionnels positifs doivent être prédominants : la protection de l’entente et de la famille, l’expression de la volonté des cédants, la tranquillité d’esprit sont autant d’arguments. L’intervention d’une tierce personne peut être une aide précieuse » propose Blandine Lestoquoy, Conseillère en transmission d’entreprise. Evoquer les cas passés, ce que l’on ne souhaite pas voir se reproduire, les anecdotes de l’actualité ou les expériences de l’entourage permet aussi d’exprimer ses craintes. Communiquer aide les membres d’une famille à mieux accepter qu’un partage est toujours perfectible, et qu’il résulte d’un consensus.

Equité versus égalité

Un partage égalitaire n’est pas toujours considéré comme juste et les membres d’une même famille peuvent avoir une idée diamétralement opposée de ce que représente une transmission équitable. « La principale préoccupation des futurs cédants est d’assurer l’équité entre les enfants en activant les leviers qui permettront au repreneur de l’exploitation de s’en sortir » précise la conseillère. C’est pourquoi il est nécessaire d’ajuster les attentes en leur permettant d’être exprimées : chacun a une idée de ce qui est juste.

Un autre point de vigilance consiste à se mettre d’accord sur la valorisation des biens transmis par donation ou succession. C’est ainsi qu’on apprend que malgré l’intervention d’experts « La valeur est parfois discutable d’un point de vue affectif, selon la vision que l’on a de du bien transmis : ce qui constitue pour l’un, la fierté de l’héritage d’un patrimoine issu du travail des générations précédentes peut parfois pour l’autre, représenter un poids à porter, occasionnant des charges subies. Un bien est plus précieux aux yeux de celui qui en a la plus grande utilité » souligne Blandine Lestoquoy. Enfin, organiser le partage du patrimoine de son vivant suppose de se préparer à la question des fluctuations de valeur des biens dans le temps afin d’éviter les sentiments d’injustice.

S’informer sur la réglementation

S’en remettre aux règles de la dévolution successorale légale est toujours possible. Elle reflète une vision particulière de la transmission familiale dont les priorités doivent permettre un partage égalitaire en faveur des enfants, tout en préservant les droits du conjoint survivant. Selon le cas de chacun, les règles peuvent être modifiées par des dispositions de droit civil résultant par exemple d’un changement de régime matrimonial, de la reconnaissance d’un enfant ou d’un divorce.  Quoiqu’il en soit, ne rien préparer de son vivant revient tout de même à faire le choix de la conception légale qui ne correspond pas nécessairement aux désirs des parties concernées. Dans la limite de la réserve héréditaire, il existe de nombreux dispositifs permettant de gratifier d’autres personnes que les héritiers légaux, de donner une avance sur part, de moduler ou rééquilibrer la répartition, d’exprimer ses volontés d’attribution ou encore d’émettre des conditions d’utilisation des biens transmis.  Dans le prolongement des aspects juridiques, la fiscalité doit être anticipée. Le partage égalitaire est basé sur la valeur brute des biens. La valeur nette d’impôt peut être bien différente pour une même part de valeur brute en fonction du statut des héritiers ou du type de bien.

La conseillère attire l’attention sur le fait que « Le souci d’équité, l’optimisation des droits et de la fiscalité sont très présents dans la construction d’un projet de transmission. Mais le passage à la retraite influence considérablement le montant des revenus disponibles pour les futurs retraités. Avant de prendre des dispositions de son vivant par testament, par le biais d’une clause bénéficiaire d’assurance vie ou encore par donations il est indispensable de s’intéresser aux avantages et aux points de vigilance que chaque dispositif présente pour se constituer des ressources suffisantes ».

A chaque étape de la réflexion, l’accompagnement d’un conseiller en gestion de patrimoine ou de votre Notaire ruraliste se révèle utile. Compléter ses connaissances en se formant avec d’autres agriculteurs permet de profiter des échanges, des retours d’expérience et de croiser les informations pour rester pleinement acteur de son projet.

Quelques chiffres :

1035,57 €/mois au 1er novembre 2021 : pension minimale garantie à 85% du SMIC pour une carrière complète de chef d’exploitation

4000 €/mois :  somme conseillée pour faire face aux besoins de la retraite pour un couple d’où l’intérêt de constituer un capital prévoyance

1,3 million : seuil en euros de valeur vénale du patrimoine net pour être soumis à l’impôt sur la fortune immobilière

Blandine Lestoquoy, conseillère tranmission, Chambre d'Agriculture du Nord Pas de Calais

L’avis de l’expert :

Avant toutes donations, il est indispensable de faire le point à la fois sur les ressources et sur les besoins à venir. Certains ont pu se constituer un patrimoine en dehors de leur activité professionnelle. Ils pourront donc compter sur des revenus fonciers, des revenus d’activités non professionnelles ou des revenus de capitaux mobiliers. D’autres compteront essentiellement sur leurs pensions de retraite et sur le capital qu’ils auront valorisé à la cession de leur entreprise. Une fois ce travail de recensement des ressources effectué, deux questions se posent « seront-elles suffisantes ? » et « de combien avons-nous besoin ? ». Bien entendu, il ne s’agit que d’estimations, mais cela permet de comparer ressources et dépenses potentielles. A partir du moment où vous évaluez l’ensemble des éléments, vous entamez une réflexion patrimoniale. Soit vous avez suffisamment de ressources et vous pouvez envisager une transmission d’une partie de votre patrimoine, soit c’est insuffisant et il vous faudra puiser dans vos réserves ou conserver votre patrimoine pour pouvoir le vendre le moment venu.

 André PRUVOST, Référant Patrimoine, AFA, réseau AS

 

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